lundi 28 février 2011

Le Chevalier Sans-Nom contre Super Kidnappeur de Dragons #2

Le Chevalier Sans-Nom contre Super Kidnappeur de Dragons #1

Platon et la Tortue volante #1



Ce jour-là, puisqu’il faut bien commencer notre histoire, le soleil est apparu en deux endroits à la fois : au-dessus des toits rouges du port dans le ciel frais du matin, et sur le bord des vagues au bout de la jetée, doucement bercé par une légère houle. 

Platon le petit marin sans bateau se promène sur les quais. Il a sur la tête le foulard que son père lui a laissé avant de partir, il y a dix ans, pour le Pays de l’Aventure, d’où il n’est encore jamais revenu.
Un navire décharge ses marchandises. Sur les pavés s’entassent caisses, tonneaux et paniers remplis des trésors rapportés par les marchands de la ville au terme d’un périlleux voyage. Platon laisse son esprit vagabonder un instant sur ces routes maritimes qu’il connait par cœur à force de les avoir étudiées sur les cartes du vieux docteur Billevesées.
Mais le périple imaginaire tourne vite court, comme souvent, car un tapage insolite vient l’interrompre. Des cris sont poussés, des jurons sont lancés, et un jeune garçon débouche d’une ruelle en courant. C’est un Indien, il a une tunique en peau de bison et une plume d’aigle royal dans les cheveux.
-Arrêtez-le ! Arrêtez-le !
Platon s’écarte pour le laisser passer.
Alors, la ruelle semble avoir un haut-le-cœur, et comme si elle les vomissait, d’inquiétants personnages surgissent dans la clarté de notre récit : ils sont trois, un petit et deux grands. Il y en a un qui est même plus grand qu’un ours des plaines glacées de l’Alaska.
Le jeune Indien se retourne. Il a un arc. Il tire très vite. La flèche passe au-dessus du petit homme qui mène le groupe des poursuivants, et vient se planter dans le ventre du très grand. Mais on dirait que ça ne lui fait rien.
-C’est très étrange, se dit Platon.
Et il s’écarte encore un peu plus.
L’Indien saute sur une gouttière qui s’appuyait nonchalamment contre un mur et grimpe sur les toits. Le très grand le poursuit, il renverse la gouttière, s’agrippe au mur et l’escalade en faisant tomber des gros morceaux de briques derrière lui. Les deux autres poursuivants, le  nez en l’air, passent comme un éclair. Ils ont tous bientôt disparus.
Un peu étourdi, Platon reste quelques secondes à regarder les toits remettre en maugréant leurs tuiles en place.
Puis il se remet à flâner sur le quai, les mains dans les poches.
-Tiens, il se dit, qu’est ce que c’est ?
De sa poche droite, il sort un médaillon aux reflets dorés. Un dessin est gravé dessus dans un style un peu fruste.
-On dirait une sorte de tortue volant dans un soleil. Sûrement un porte-bonheur !
Platon a sans doute raison, car un médaillon qui arrive comme par magie dans sa poche, ça ne peut être qu’un porte-bonheur.
-Grande Loterie du Prix d’Offenbach ! crie alors un bateleur non loin de là. Venez tenter votre chance ! En l’honneur de notre vendredi le treizième, la cagnotte est de 300 petits florins ! Grande Loterie du Prix d’Offenbach! Double chance, deux tirages successifs !
Platon achète un billet. C’est le numéro 66.
Le ticket dans une main, le médaillon dans l’autre, le petit marin attend patiemment le résultat du premier tirage. La roue tourne, s’arrête, et annonce le gagnant :
-Numéro 66 !
-Je le savais, dit simplement Platon.
Il range alors précieusement son précieux talisman, récupère son lot de 300 petits florins et se dirige d’un pas joyeux vers l’office du bon docteur Billevesées. Il a hâte d’annoncer la nouvelle au vieil homme ! Ce petit pécule que la chance lui offre aujourd’hui va enfin lui permettre de s’acheter un bateau et de partir à son tour à la recherche du Pays de l’Aventure…
Mais avant cela, il va s’offrir un bon repas à l’auberge de l’Amiral Benbow.

Surfer Hanuman

Le canyon de l'Embuscade Mortelle des Indiens



-Halte !
Le lieutenant Cooper ordonne à ses hommes de s’arrêter. Quelques chevaux hennissent. Ils ont soif, mais ce n’est pas encore le moment de se reposer.
-Nous allons entrer dans le Canyon de l’Embuscade Mortelle des Indiens !
Le soldat Zane lève la main.
-Je n’aime pas trop passer par ce canyon, lieutenant !
-Ah bon ? Et pourquoi ça, soldat ?
-Un mauvais pressentiment…
Le lieutenant Cooper dévisage le soldat Zane.
-Gardez vos pressentiments pour vous ! La cavalerie américaine est au-dessus de ça !
Quelques soldats lèvent la tête.
-C’était une façon de parler ! grogne le lieutenant.
Le soldat Grey tend le bras vers les premiers contreforts du canyon.
-Non, mais on a vu des Indiens là-bas !
Cooper se retourne et scrute les rochers.
-Je ne vois rien.
-Si si, je vous assure, il y en avait trois !
-Quatre ! précise le soldat Twain.
-Je ne vois rien, répète le lieutenant.
Les rochers restent immobiles, c’est quelque chose qu’ils savent bien faire. L’un d’eux a une plume d’aigle qui dépasse.
-C’est quand même bizarre, ce rocher avec une plume, marmonne le sergent London.
-Vous trouvez, sergent ? demande le lieutenant.
Le sergent London est plutôt avare en paroles habituellement, et le lieutenant Cooper a appris à tenir compte de ses réflexions.
-Vous êtes sûr que vous trouvez ça bizarre, sergent ?
-Affirmatif, mon lieutenant !
Cooper se tourne vers ses hommes.
-Qui d’autre trouve qu’un rocher avec une plume d’aigle est bizarre ?
Vingt cavaliers, sur les vingt-cinq que compte le détachement, lèvent la main.
-Et les autres ?
Le soldat Zane prend la parole :
-Moi, je ne sais pas si j’aurais dit « bizarre » ! Je trouve ça plutôt « incongru », mon lieutenant…
Le lieutenant sort son petit carnet et note le mot.
-« Incongru »… très bien… qui d’autre ?
Le soldat Peckinpah prend la parole que lui tend le soldat Zane :
-Eh bien moi je trouve ça un peu « excentrique » pour un rocher !
-« Excentrique »… très bon, ça !
C’est au tour du soldat Ford :
-Moi, ça m’est égal, ce rocher fait bien ce qu’il veut, si vous me permettez, mon lieutenant !
-C’est un avis qui n’engage que vous, Ford !
Le soldat Twain s’avance alors :
-En fait, j’avais dit que je trouvais ça bizarre, mais finalement, après avoir entendu Zane, je trouve ça « incongru » moi aussi !
-Moi aussi ! dit le soldat Fenimore.
-Ah non, personne ne change d’avis, sinon on ne va pas y arriver ! s’écrie le lieutenant Cooper. Et vous, Wayne, on ne vous a pas entendu !
-J’hésite, mon lieutenant ! Parce que en même temps je trouve ça bizarre, et en même temps, si on part du principe qu’il y a peut-être un Indien caché derrière, ça prend sens, vous voyez…
Le lieutenant prend un air de concentration. Il n’en a emmené qu’un ce matin, mais il se dit que c’est le bon moment pour l’utiliser.
-Vous n’avez pas tout à fait tort, Wayne ! Je n’y avais pas pensé…
Tous les regards se tournent vers le rocher.
-Oh ! s’écrie Zane. Il y en a un autre !
-Oui, dit Grey, mais celui-ci a une plume de corbeau, non ?
-Exact ! Une plume de corbeau, c’est tout à fait ça ! Tenez, vous avez bien gagné votre badge « Ami des oiseaux », mon vieux !
-Merci, mon lieutenant !
La cérémonie de remise d’un badge est un évènement important dans la vie du régiment. Les cavaliers mettent pied à terre, époussettent leur chemise, sortent leurs gants blancs d’apparat et font briller leur sabre. Et c’est avec émotion que le lieutenant Cooper remet son badge à son subalterne, car il est fier d’avoir de tels hommes sous ses ordres !
La cérémonie achevée, chacun remonte à cheval.
-Oh ! s’écrie Peckinpah. Encore un autre rocher avec une plume !
Tout le monde regarde avec attention.
-Attendez, attendez, je reconnais cette plume !
-Oui, moi aussi, euh… une plume de mésange ?
-N’importe quoi ! C’est une plume de faucon !
-Non, non, c’est une plume d’oreiller !
Le lieutenant coupe court à la querelle.
-C’est une plume de caneton ! affirme-t-il.
-Elle est bien trop grande, mon lieutenant, dit le sergent London. Et en plus elle est bleue.
Le silence gêné dure deux minutes quand même.
-C’était un gros caneton ! tranche le lieutenant. Bleu. Et à l’avenir, sergent, quand j’aurai besoin de votre avis, je vous ferai signe !
Le soleil se met alors à sonner doucement dans le ciel.
-Ding ding ding…
Le lieutenant Cooper sort sa montre. Il l’ouvre et un petit éclat d’amour vient se loger dans son œil. Le portait de la douce Mary lui sourit tendrement.
-Je vous ai parlé de Mary, sergent ?
-Je croyais qu’elle s’appelait Anna, mon lieutenant !
Le lieutenant referme sa montre.
-Vous êtes sûr, sergent ? Bah, peu importe, il est l’heure de rentrer au fort, on a un peu trop traîné avec ces histoires de plumes ! On passera le Canyon de l’Embuscade Mortelle des Indiens une autre fois !
La petite troupe fait demi-tour, et le nuage de poussière qui la suit disparaît bientôt à l’horizon.

Alors, une voix s’échappe de l’un des rochers.
-Tu crois vraiment, toi, que c’est un peu trop excentrique ?

On a volé les rayons du soleil #6

On a volé les rayons du soleil #5

On a volé les rayons du soleil #4

On a volé les rayons du soleil #3

On a volé les rayons du soleil #2

On a volé les rayons du soleil #1

Vano et le Trubichinchose


Histoire du Roi dans le Ciel


Histoire du Roi dans le ciel

Cet oiseau, là-bas, qui vole dans le soleil, c’est le Roi dans le ciel.
Il a sa garde personnelle qui vole à ses côtés, ce sont des aigles aux grandes envergures, et un condor, très vieux, est là aussi qui lui tient lieu de conseiller.
Et en tant que conseiller, il lui conseille de ne pas suivre ses conseils. Ce condor est vraiment un bon conseiller.

Un jour, un martinet se présente devant le Roi dans le ciel.
Les martinets sont ces oiseaux qui volent toujours, même pour dormir, ils volent, très vite, très longtemps, ils volent.
Mais celui qui arrive ce jour-là a des lassitudes sur son dos, des airs épuisés, et ses ailes tremblent de fatigue. Il dit :
-Roi dans le ciel, les oiseaux de la voûte céleste de l’Ouest réclament ton aide ! Oui, oui ! Les loups du vent et leur Général sont passés à l’attaque, et ils hurlent de manière fantastique, et plusieurs oiseaux sont morts déjà ! Roi dans le ciel, les oiseaux de la voûte céleste de l’Ouest réclament ton aide !
Le Roi dans le ciel se tourne vers son conseiller qui, en tant que conseiller, ne sait pas trop quoi lui dire.
-Le Général des loups du vent est fourbe. Il m’avait pourtant promis de ne plus jamais nous attaquer. Mais les vents sont tellement changeants ! Et sa promesse a dû se faire emporter par un courant d’air.
Alors, le Roi dans le ciel rassemble ses aigles, et il demande à ses unités d’élite, les milans royaux et les harfangs des neiges, de venir aussi, car le Général des loups du vent est un adversaire redoutable. La dernière fois qu’ils se sont affrontés, le Roi dans le ciel avait failli y laisser la vie.

Sous la voûte céleste de l’Ouest, la bataille fait rage, et les vents soufflent de plus en plus fort, et les loups sont bien trop nombreux. Le Général hurle pour exciter ses troupes, et c’est vraiment quelque chose d’effrayant.
Les oiseaux résistent, mais les loups déchirent leurs ailes, arrachent leurs plumes, et les oiseaux tombent et traversent les nuages en pleurant de désespoir.
-Tenez bon ! Tenez bon !
Les oiseaux se relèvent, ils ont reconnu la voix du Roi dans le ciel.
Les aigles, les milans et les harfangs se lancent comme des flèches sur les loups du vent. Pris de panique, les loups se jettent de tout côté, et le vent ne peut plus les porter, et beaucoup d’entre eux disparaissent dans les tourbillons des fureurs déchaînées. Leurs cris résonnent longtemps dans le ciel.
Et au-dessus de tout cela, enlacés dans une lutte terrible, le Roi dans le ciel et le Général des loups se livrent une bataille meurtrière. Du sang coule qui teinte la nuit tombante d’un rouge lumineux.
Ce jour-là, le Roi dans le ciel est le plus fort. Il donne un coup de bec dans l’œil du Général, et ses serres coupent les chairs du vieux loup, qui s’enfuit sans demander son reste sur un petit bout de mistral.

C’était un épisode de la vie du Roi dans le ciel.